Un rapport critique de la Cour Régionale des Comptes
La Cour Régionale des Comptes d’Occitanie, dans son rapport de janvier 2025, alerte sur l’artificialisation excessive du littoral des Pyrénées-Orientales et sur la sous-estimation des risques liés au changement climatique, à la mer et aux inondations.
Le rapport critique notamment :
L’urbanisation du littoral, malgré une vulnérabilité accrue aux aléas naturels.
Des décisions d’aménagement qui accentuent ces risques, comme la construction d’une zone d’activité à Argelès-sur-Mer et l’extension des ports.
Sur le terrain, les contradictions sont manifestes :
- D’un côté, les élus clament leur volonté de protéger une côte fragilisée par l’érosion et le changement climatique.
- De l’autre, ils soutiennent des projets d’infrastructures portuaires qui menacent cet équilibre précaire. Entre déclarations d’amour pour l’environnement et frénésie de bétonisation, les contradictions s’amoncellent.
Entre discours écologiques et frénésie de bétonisation, les incohérences se multiplient, laissant planer des soupçons de conflits d’intérêts autour du développement portuaire sur la côte catalane.
L’héritage de la Mission Racine : un aménagement aux conséquences lourdes
L’aménagement du littoral occitan, initié dans les années 1960 par la Mission Racine, a certes dynamisé l’économie locale, mais au prix d’une profonde perturbation de l’équilibre sédimentaire et de la biodiversité. Aujourd’hui, les infrastructures portuaires jouent un rôle majeur dans l’érosion du littoral.
Les ports : Des extensions au détriment du littoral
Présentés comme une réponse aux défis économiques et climatiques, les ports et leurs extensions actuelles entraînent des conséquences majeures :

- Artificialisation et bétonisation des côtes : La construction ou l’agrandissement des infrastructures portuaires détruit des écosystèmes fragiles, menace la biodiversité et augmente leur vulnérabilité face au dérèglement climatique.
- Erosion du littoral : Les digues bloquent la dérive littorale et l’exporte parfois définitivement vers le large provoquant l’érosion des plages situées en aval transit.
Si le dérèglement climatique contribue à l’érosion côtière, son rôle reste encore marginal face aux perturbations causées par l’artificialisation du littoral et plus particulièrement les infrastructures portuaires. Celles-ci perturbent les courants marins, bloquent le transport sédimentaire, aggravant la pénurie de sable sur la côte et l’érosion des plages sableuses. Ce phénomène est bien documenté depuis des décennies. En 2002-2003, la Mission littorale Inter-ministérielle du Languedoc-Roussillon alertait sur ces impacts et recommandait un moratoire sur ces constructions, sans être entendue. Comment justifier aujourd’hui l’ajout de béton et de digues alors même que ces ports contribuent à la disparition des plages ?
Le dérèglement climatique est devenu, à la fois, le coupable idéal pour expliquer l’érosion du littoral et le prétexte pour intensifier le bétonnage afin de protéger les ports contre ses effets.
Trois ports au cœur des controverses dans les Pyrénées-Orientales
1- Le port de Saint-Cyprien : Un recul du trait de côte anticipé
Dès sa construction en 1967 dans le cadre de la Mission Racine, les concepteurs du port avaient prévu un recul de 110 m du trait de côte au Nord du port et avaient recommandé de construire une batterie de 6 épis pour limiter l’érosion ; Un seul fut réalisé. En 2004, alors que le recul du trait de côte atteignait près de 80 m, 5 autres épis furent construits repoussant l’érosion plus loin.L’ampleur du phénomène, prévue dès l’origine, démontre que l’érosion est avant tout une conséquence des aménagements portuaires, et non du réchauffement climatique.
2 – Le port d’Argelès sur Mer : Une urbanisation condamnée dans le passé par le Conseil d’Etat et un projet d’extension controversé
– L’érosion du Racou, site remarquable (protégé, inscrit, classé) du littoral catalan illustre parfaitement le lien direct entre l’extension d’un port et le recul du trait de côte. ; Il constitue un cas d’école de l’impact des infrastructures portuaires sur le littoral. Les plages argelésiennes au Nord du port s’étant élargies, il est impossible d’incriminer le réchauffement climatique ou la pénurie sédimentaire.
– Deux expertises judiciaires ont confirmé la responsabilité directe du port dans l’érosion du Racou. Pourtant la municipalité poursuit un projet d’extension portuaire controversé.
Parallèlement, en juin 2024, la municipalité d’Argelès a voté une modification du périmètre de la zone Natura 2000 de l’Embouchure du Tech et du Grau de la Massane, ce qui :
- Soulève des interrogations sur sa légalité, car les procédures réglementaires sont strictes et une commune ne peut modifier seule un site protégé.
- Faciliterait l’artificialisation et l’urbanisation du littoral, en réduisant les contraintes environnementales, notamment autour du port et du Racou.
- Met en péril un site d’intérêt écologique (Racou, Massane) alors que des constructions illégales (parkings payants en zone protégée) ont déjà été réalisées.

3 – Le port de Sainte Marie-la-Mer : Une extension paradoxale. Le port de Sainte-Marie constitue un facteur majeur de l’érosion locale. Ses digues bloquent le transit naturel des sédiments, privant les plages situées en aval de leur apport en sable. Depuis vingt ans, des travaux coûteux de protection se succèdent pour tenter de freiner cette érosion. Pourtant, l’extension portuaire récemment validée par la justice ne fera qu’aggraver la situation et menacer le village.Ce projet soulève des contradictions évidentes. D’un côté, le maire appelle publiquement à la solidarité nationale pour lutter contre l’érosion de sa plage ; De l’autre, en tant que président de l’ObsCat (Observatoire de la Côte Catalane), il ne peut ignorer l’impact des ports sur la biodiversité et le recul du trait de côte ; Enfin, en tant que Maire, il décide d’agrandir son propre port aggravant le problème qu’il prétend combattre.
Sainte Marie la Mer : Blocage de la dérive littorale par la digue et érosion en aval transit

Ce projet est soutenu par le président du Parc Marin du Golfe du Lion également président de l’UVPO (Union des Villes Portuaires d’Occitanie qui annonce, dans les médias, que en passant de 800 anneaux prévus à seulement 579, le Maire « a pris la mesure d’avoir un port beaucoup plus à la mesure de Sainte-Marie ». Pourtant, à terme, le futur port de plaisance comptera 1043 anneaux. Cherchez l’erreur !
Au final, cette situation frise l’absurde :
- D’un côté, on agrandit un port et ses digues, accentuant l’érosion d’une plage déjà sous perfusion, qui dépend d’épis, de rechargements annuels et d’expérimentations variées (géotube, filet marin…)
- De l’autre, à seulement 3 km au nord, on prévoit de démanteler une digue de 70 mètres, construite il y a 40 ans pour protéger l’embouchure du Bourdigou. L’objectif ? Restaurer le transit sédimentaire entravé par cette digue… qui, ironie du sort, provoque l’érosion en aval.

Où est la logique ?
- D’un côté, d’agrandir le port de Sainte-Marie ce qui va encore aggraver l’érosion de la plage voisine, une plage déjà sous perfusion avec sa batterie d’épis, ses rechargements annuels et ses expérimentations multiples (géotube, filet marin, … ).
- De l’autre côté, à seulement 3 km au nord, de démanteler une digue de 60 mètres, construite il y a 40 ans pour protéger l’embouchure du Bourdigou. L’objectif ? Restaurer la dérive littorale, bloquée par cette digue qui provoque l’érosion de la plage du Bourdigou en aval-transit.
En somme, ce que l’on construit à Sainte-Marie, on le déconstruit trois kilomètres plus loin au Bourdigou. Une logique imparable ! Et tout cela est financé par l’État.
L’impact irréversible de la bétonisation du littoral
L’influence du lobby portuaire façonne le développement du littoral des Pyrénées-Orientales en privilégiant des logiques économiques en contradiction avec la préservation du patrimoine naturel et le bien-être des citoyens.
En favorisant les extensions portuaires et les constructions en zone sensible, les autorités locales aggravent l’érosion côtière et bafouent les protections environnementales. Trop souvent, le dérèglement climatique est utilisé comme un prétexte pour exonérer ces infrastructures portuaires de leurs responsabilités.
Cette transformation du littoral est irréversible : aucune compensation écologique ne peut en atténuer les effets. Elle menace directement la biodiversité et, à terme, les populations qui en dépendent.
Face à cette situation, de nombreuses voix s’élèvent pour exiger plus de transparence dans les décisions publiques et une prise en compte accrue des enjeux écologiques et sociaux dans l’aménagement du territoire.

Signatures de ce texte :
Collectif Associatif pour la Sauvegarde du Patrimoine Argelésien
– Association pour la Sauvegarde du Racou – Michel Guiu
– Association de Défense des Résidents d’Argelès sur Mer, La Plage, le Racou – Bernard Olivier
– Argelès Nature Environnement – Corinne l’Hérisson